Publié le 27 mars 2019
Le surf en eau douce
Crédit photo : © Simon Hurion

Le surf en eau douce

À la recherche de la vague parfaite
SPORTS NAUTIQUES
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Surf, Reportage

Offrande de la nature ou création de l’homme, la vague se démocratise, s’exporte vers d’autres contrées, d’autres provinces, loin de l’immensité des océans. Phénomène d’abord isolé sur des spots secrets en rivière domptés par des habitués de la glisse, le surf de rivière et son pendant en bassin artificiel semblent aujourd’hui connaître un véritable engouement.

Le surf n’est plus réservé à ceux qui ont la chance de vivre le long des côtes océaniques, il débarque bel et bien en campagne, non loin des villes et autres endroits où l’eau coule à flots. Les puristes s’offusqueront sûrement du détournement de spots légendaires vers d’autres lieux moins conventionnels. Qu’importe pour les passionnés citadins ou montagnards, l’appel du surf est le plus fort.

Dompter les cours d'eau

Bien moins médiatisé que son cousin des mers et océans, le surf de rivière est forcément moins pratiqué. Pourtant lorsqu’on s’intéresse à ce qui se passe ailleurs que sur les immenses étendues d’eau salée du globe, la pratique prend une toute autre dimension. On se rend vite compte que le domptage de vagues en rivière est finalement assez répandu aux Etats-Unis, au Canada, en Allemagne, en Autriche, en Suisse, mais peu de médias en parlent. Ce qui fait, en définitive, du surf de rivière une expérience assez mystérieuse voire étrange pour les novices. Comment cela marche-t-il ? Où trouve-t-on ces vagues spéciales ? Qui peut essayer ? Autant de questions intéressantes à décrypter pour comprendre le concept.

Véritable phénomène alliant nature et passion de la glisse, le surf de rivière se développe lentement mais sûrement parmi une communauté de surfeurs las d’entreprendre de gros trips pour effleurer la vague parfaite. Cette onde tant recherchée peut désormais se trouver près de chez soi, dans des cours d’eau où la nature s’est appliquée à nous offrir de somptueux terrains de jeux. Certaines conditions doivent cependant être remplies. Un débit et un fond de rivière adéquats constituent déjà une bonne base.

Il existe deux sortes de vagues de rivière. La première est creusée par les éléments, elle est complètement naturelle. La découverte d’un tel Eden a forcément poussé pratiquants et passionnés de surf à s’intéresser à la manière de la reproduire ailleurs ou à l’intensifier, sans toutefois perturber l’environnement et l’écosystème du lieu. Il s’agissait de provoquer la vague, créer le coup de pouce pour produire le phénomène. On a donc vu apparaître la deuxième, celle shapée par l’homme, sur des endroits propices et grâce à des structures qui s’intègrent dans le lit de la rivière pour en accentuer l’angle. Compte tenu de la dépendance aux phénomènes naturels, la saison en eaux vives se concentrera généralement entre l’hiver et le printemps et à l’automne, la fonte des neiges ou de grosses pluies favorisant l’augmentation du débit.

En Europe, la vague la plus célèbre est sans doute la Eisbach wave en plein centre de la ville de Munich. Cette onde naturelle qui déroule à l’infini grâce au débit intense du cours d’eau, offre aux surfeurs aguerris de vibrantes sensations de glisse. Un peu plus proche, le spot de Little Horses, aux alentours de Lyon, est assez renommé et attire de nombreux amateurs. En Suisse, différentes localités dévoilent leur houle spontanée à qui souhaite les surfer. Entre autres, Bremgarten, Thoune et Bâle, pour ne citer qu’elles.

Une Vague Sur le Thiou

En tant que capitale des sports Outdoor en France, Annecy n’est pas en reste côté communauté d’amateurs de glisse. C’est ici qu’est née, en 2017, l’association Surfeurs d’Eau Douce. Destinée à rassembler les fanatiques locaux du surf et leur faire découvrir la pratique en rivière, l’asso est aussi à l’initiative du projet Annecy Wave, co-soutenu par la start-up Meo River Concept. Ils oeuvrent ensemble pour le développement d’une vague de surf sur le Thiou. L’entreprise, totalement inédite sur la commune annécienne, paraît ambitieuse mais présente une réelle alternative aux vagues indoor et aux bassins artificiels, très gourmands en énergie. Pour le principe, il s’agit de réaménager le Seuil Mercier, petit barrage laissé à l’abandon situé sur le cours du Thiou. L’endroit est idéal, selon les initiateurs du projet, pour la mise en place d’une structure capable de générer une vague statique continue en contrebas du barrage. Au delà de la création d’une mini-station pour les riders afin de se changer ou se restaurer, la communauté s’est engagée à la redynamisation de l’espace à l’aide d’une gestion commune avec d’autres usagers comme les pêcheurs, les kayakistes, les pratiquants de Stand Up Paddle. Fédérer les acteurs du sport et de l’environnement est également une préoccupation majeure pour le collectif Annecy Wave qui souhaiterait voir naître le projet rapidement. En attendant la concrétisation de l’idée, Surfeurs d’Eau Douce multiplie les actions de mobilisation et d’information à ceux qui souhaitent s’impliquer tout au long de l’année. Après une première phase de présentation aux élus de la commune qui ont su entendre ses acteurs avec grand intérêt, l’équipe entame la seconde phase de développement, engager un partenariat avec la mairie et réaliser cette vague avec l’aide de la communauté.

S'inspirer de la nature

A l’instar de l’expérience en milieu naturel, une autre idée de la pratique fait des émules depuis quelques années et se développe encore plus fortement depuis que le surf a été annoncé aux Jeux Olympiques de 2020 à Tokyo : la vague en bassin artificiel. Cette dernière, entièrement modelée par l’homme, fonctionne grâce à des structures complexes mêlant nouvelles technologies et innovations.

À ne pas confondre avec les vagues dites « statiques » ou « flow rider » qui propulsent de l’eau à grande vitesse sur un plan incliné, ces nouvelles vagues dynamiques recréent une onde plus proche du mouvement naturel de la houle. La plus populaire de ces dernières est certainement celle du Surf Ranch, imaginée par le surfeur californien ultra-médiatisé, 11 fois champion du monde de la discipline, Kelly Slater. L’athlète, qui a dévoilé son projet en décembre 2015, souhaitait révolutionner l’expérience avec un mécanisme performant et un fonctionnement eco-responsable. Et il l’a fait. Non seulement la vague est aujourd’hui la plus fluide et ‘glassy’ du monde grâce à un système unique mais elle est en plus la seule entièrement alimentée par l’énergie solaire, une prouesse sur le plan écologique !

développé par une communauté de surfeurs las d'entreprendre de gros trips pour effleurer la vague parfaite

Un autre géant de la glisse « préfabriquée » est la société Wavegarden. À l’origine de complexes déjà existants en Espagne, au Pays de Galles et au Texas, la compagnie innove et se développe à vitesse grand V.  Pour preuve, ses 2 prochaines inventions prénommées ‘The Cove’ seront implantées à Melbourne et à Bristol au Royaume-Uni. La technologie répliquera le mouvement exact des particules d’eau des vagues de fond, générant un ‘swell’ parfait non impacté par les mouvements d’eau contraires. Ce procédé breveté produira 2 vagues toutes les 8 secondes et permettra un temps moyen de ride de 20 secondes ! Un ‘Cove’ devrait voir également le jour en France en 2020. Le centre serait ouvert au public dès 2021, en attendant il accueillerait l’entraînement des surfeurs français en vue des JO de Tokyo puis ceux de Paris en 2024. C’est sur la commune de Castets dans les Landes que cette grande première sur le territoire français verrait le jour.

Tous ces complexes ont entraîné une dynamique positive pour l’émergence de systèmes similaires. À Annecy, Hydrostadium, filiale d’EDF créée en 2001 par Gilles Bernard, innove avec une technique brevetée différente. À l’origine, la structure était spécialisée dans la création de stades d’eaux vives pour le canoë kayak, puis elle s’est diversifiée avec la gestion de petites centrales hydro-électriques. Grâce à ce savoir, Hydrostadium dépose un premier brevet en 2006 qui, faute de budget, ne fait pas vraiment de vagues… Jusqu’en 2016. Grâce à un concours interne à EDF, des fonds sont à nouveau débloqués pour lancer le projet. Suite à une phase de travail en amont sur modèles réduits d’environ un an, la société est prête en 2017. Elle s’inspire de la mécanique du surf en rivière tout en maîtrisant les coûts d’installation. Le résultat, deux structures exclusives, l’une en piscine, Wave Stadium, et l’autre flottante, vague à surf. Cette dernière, non intrusive pour le plan d’eau, est posée sur des flotteurs et aucune construction n’est nécessaire pour la supporter. L’eau est aspirée par des pompes alimentées en électricité puis redistribuée sur un plan incliné afin de récréer la vague, le tout en étant très raisonnable énergétiquement parlant.

Hydrostadium trouve un partenariat avec le groupe Exo Loisirs début 2018, très intéressé par le système. La première version du vague à surf sera inaugurée et ouverte au public dès le 6 Avril 2019 sur le wakepark de Tencin, proche de Grenoble. En étant capable de générer un plaisir semblable à la discipline en milieu naturel, cette vague devrait contenter toute une communauté de passionnés frustrés de ne pouvoir frôler l’eau salée que par intermittence.Fluide, dangereuse, mystique, la fameuse vague parfaite, le graal pour les surfeurs et l’indicible bonheur de glisser ne cessent de nous faire rêver. Loin de détrôner la « vibe » du surf côtier, initiatique, héritage des populations indigènes hawaïennes, les disciplines en eau douce représentent une alternative à la difficulté et à l’irrégularité des spots en mer.

On peut alors s’interroger sur l’essence même de ce sport, qui, initialement synonyme de liberté, d’indépendance et de communion avec les éléments pourrait être relégué au statut d’attraction commerciale. Entre son entrée aux JO et l’émergence des complexes à gros budget, l’esprit affranchi originel et l’indépendance de la culture surf survivront-ils à l’évolution de la pratique ?

Quelques dates et chiffres

  • 1966 : Une piscine à vagues est utilisée pour la première fois par des surfeurs à Tokyo. (1)
  • 1985 : Première compétition en piscine à vagues réunissant les meilleurs surfeurs mondiaux en Pennsylvanie. (3)
  • 1997 : Record de la plus grande vague en piscine en 1997 (+ de 2m) en Malaisie. (2)
  • 2015 : Ouverture de Snowdonia au Pays de Galles, la première piscine à vagues artificielles dynamiques accessible au public.
  • 2016 : Le comité olympique annonce l’entrée du surf aux JO d’été de Tokyo en 2020.

 

 

Texte : Olivia Bergamaschi

 

Carte des spots de surf en rivière
Retrouvez toutes les vagues de rivière à surfer en Europe.
http://riverbreak.com/

Surfeurs d’eau douce
https://www.surfeursdeaudouce.com/

Hydrostadium
https://www.hydrostadium.com/

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