Publié le 2 novembre 2025
Up and Down – Le film de Maël Feron sur la Mégavalanche : entre VTT enduro, études et créativité
Crédit photo : ©Téo Level - krk.production
Interview

Up and Down – Le film de Maël Feron sur la Mégavalanche : entre VTT enduro, études et créativité

Avant le départ de la mythique Mégavalanche, Maël Feron a choisi de gravir l’Alpe d’Huez… à la force des jambes, en pleine nuit. Up and Down retrace cette aventure folle, entre effort solitaire, passion du VTT enduro et goût du dépassement.
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À 21 ans, Maël Feron ne cherche pas seulement à rouler vite. Il aime les projets qui racontent quelque chose, les défis qui sortent du cadre de la compétition pure.
Son dernier en date : rallier la Mégavalanche à la force des jambes, depuis la vallée, avant de s’élancer dans la mythique descente.
Entre gestion du timing, préparation minimaliste et mental d’acier, il revient sur cette aventure qu’il appelle simplement : Mégavalanche Up & Down.

 

Crédit photo : Téo Level

 

Salut Maël ! Pour commencer, est-ce que tu peux te présenter et nous en dire un peu plus sur ton parcours et tes activités actuelles ? 

Je m'appelle Maël Feron, j'ai 21 ans et je suis en quatrième année d'école d'ingénieur à L’INSA à  Strasbourg, en spécialité génie mécanique. Côté vélo, j'ai commencé l'enduro il y a trois ans maintenant, en compétition et en loisir.
Avant ça, j’ai fait du cross-country, du trial et un peu de dirt aussi. Dès que j'ai eu 18 ans, je me suis acheté mon enduro… et j'ai direct fait la Coupe de France.

On te suit sur les réseaux et on sait que tu aimes bien les défis. Tu avais justement fait le tour du Mont-Blanc avec Jules Auroux, en VTT puis sur la route. Ça vient comment l'idée de se dire, je vais aller à la Mégavalanche depuis le bas ?

Je me souviens bien du moment où j'ai eu l'idée. J'étais au cinéma à Strasbourg pour une édition de Tous en Selle. J'y suis allé avec des copains qui font du vélo et des vidéos. J’avais en tête d'essayer de m'inspirer de ce qui me plaisait des formats, de comprendre ce que je voulais raconter à mon tour. Un des films me plaisait un peu moins, j'ai donc décroché, j'avais l'esprit qui bouillonnait et d'un coup... l'idée est née !

Je l’écris dans mes notes — remplies  d'idées de vidéos, des défis — je la mets avec les autres. Quelques mois plus tard, je l’ouvre à nouveau et je me dis : "Cette année, c’est elle ! Je le fais."

Arriver en haut ce n’était pas une crainte

Crédit photo : ©Marvin Gourdon

Et justement, quel était le plus gros enjeu de ce défi Up & Down ?

Arriver en haut ce n’était pas une crainte. Avec l’expérience que j’ai eue cette année et la préparation pour l’Épic Enduro, je n’avais pas peur. C’était plutôt d’arriver au bon timing, ni trop tôt, ni trop tard. Si ce timing était mal géré, j’étais foutu.

On a vu que durant ta montée, il y a eu des endroits qui étaient plus compliqués ou plus raides. Est-ce que tu as eu peur de ne plus avoir d'énergie pour la course en elle-même ?

Un peu stressé pour l’heure d’arrivée, oui. Mais je savais que j'allais pouvoir arriver en haut sans être trop cramé. Le seul moment de doute, où je me suis senti vraiment mal, c'est quand j'étais sur la ligne de départ, après m’être « reposé ».

Autrement, il n'y a aucun moment où  j’ai pensé à abandonner ou à ne pas pouvoir faire la descente.

 

Comment sur les mois précédents la course, tu t'es préparé en amont de ce défi ? Est-ce qu'il y a eu une préparation spécifique à ça ou pas forcément ?

Sur le point physique, je m'étais préparé pour l'Epic Enduro en début de saison. La caisse, je l’avais. En mai, j'ai eu tous mes partiels. Donc là, je n'ai pas touché au vélo. Puis en juin, j’ai recommencé avec le Tour du Mont-Blanc, en vélo de route. Les courses se sont enchaînées ensuite. Donc, je n'ai vraiment pas particulièrement préparé ça physiquement, à part en faisant des compétitions !

Côté logistique, le plus gros boulot, ça a été de trouver le financement et d’en parler aux sponsors. C’est le plus dur. L'aspect du tracé, la préparation de matériel, j’ai fait comme je fais mieux : à la dernière minute.

J'avais déjà fait la Méga, je connaissais le lieu. Le budget était fixé, l’idée était prête. C'est pas comme le tour du Mont-Blanc où il y a plein d'inconnues. Ici, tu montes par une route. Ensuite un tracé que j’ai fait plusieurs fois, puis le glacier. Rien d’imprévisible.

La veille, j'ai trouvé des crampons pour Téo mon cadreur et moi : c’était bon !

 

Crédit photo : ©Téo Level / ©Marvin Gourdon

 

Et tu réussis à dormir ? Comment tu gardes des forces ?

Je me suis reposé toute la journée. Et j'ai dormi de 21h à 23h. Mais tu sais, avec l'excitation, en fait, tu n’as pas besoin de dormir.

Qu'est-ce qui s'est avéré le plus difficile : La montée, la descente, ou le mental ?

Le plus difficile, c'était vraiment la toute fin du parcours : les gros pierriers raides et le mur. Je n’ai pas été dans le mal comme j’ai pu l’être sur le Tour du Mont Blanc ou l’Epic Enduro. Fatigué, mais pas « mal ». Je pense que si je n'avais pas fait la montée, je n'aurais pas fait un aussi bon résultat. Parce que cet état de flow là, cette facilité que j'ai eue dans la descente, je suis persuadé que je ne l’aurais pas atteinte si j'étais parti comme tout le monde.

Aucune relance où tu te dis : « C’est dur, je puise vraiment loin en moi ? »

Au contraire ! J'étais étonné à quel point je pouvais en mettre. Avec du recul… J’aurais pu plus en mettre dans la longue relance. Mais bon, je te dis ça, si ça se trouve j'aurais craqué !

La décision c’était d'en garder au début. Et à la fin, lors de la dernière relance avec Kilian, j’étais étonnamment frais. Lorsque je sais exactement ce qu'il me reste à parcourir et que je l'ai estimé, mon mental me dit : Il te reste ça, tu ne lâcheras pas tant que ce n’est pas fait.

En revanche, dès que je suis arrivé en bas, une heure après je suis allé au resto, je me suis endormi sur mon burger.

Si je n'avais pas fait la montée, je n'aurais pas fait un aussi bon résultat. Cet état de flow là, cette facilité que j'ai eue dans la descente…

Crédit photo : ©Marvin Gourdon

Il y a peut-être de la pression qui s'est enlevée aussi. Tu avais quasiment réussi ton défi d’arriver en haut et debout. Descendre maintenant, c'est bonus. Du coup, tu t'enlèves la pression.

C'est ouf ce que ça fait. Je pense que il y a ça, mais la plus grosse partie, c'est comme je l’ai vécu à l’Epic Enduro. Les premières spéciales, je faisais des temps corrects. La deuxième boucle, je me fais un peu ouvrir. La troisème boucle, après 10 heures sur le vélo, je suis vraiment rentré dans un état de flow. J’ai gagné quasiment toutes les spéciales de la dernière boucle. Je roulais vite, à la limite, mais sans forcer.

Et physiquement, je me sens frais alors qu'en réalité, je ne suis pas frais. Je pense que j'avais ce schéma-là aussi un moment pendant le tour du Mont-Blanc avant que je craque sur la fin. Là c’était pareil, de l’adrénaline pure.

Combien de temps t’a pris la montée ?

J'ai mis 7h30. On est parti à minuit, on est arrivé à 7h30 au glacier.

J'avais prévu d'arriver à 7h. Je suis monté à un rythme sans être dans un seuil de douleur. Le genre de rythme où je pouvais tenir pendant des heures et des heures sans puiser dans mes ressources. Ce timing, toujours en tête, on n’a pas trainé dans les 21 virages de l’Alpe d’Huez. C’était tout de même serré, donc il ne fallait pas trop prendre son temps. 

Et dans la nuit complète, tu ressens quoi ? Tu entres dans une sorte de tunnel d’effort ?

Oui, je pense. Quand tu es dans le noir, le lever de soleil est ton repère. Tu approches du but. C'est ultra motivant. Tu vas commencer à avoir du paysage, des belles lumières. Mais avant ça, toute la nuit, tu baisses la tête et tu pédales.

 

Crédit photo : ©Téo Level

 

Tu participes aux Enduro World Series depuis quelques années. Qu'est-ce qui diffère entre une course de Coupe du Monde et une Mass Start comme la Mégavalanche ? Et aussi, après, qu'est-ce que tu préfères rouler aujourd'hui ?

Ce n'est vraiment pas du tout le même effort. En Coupe du Monde tu n'as pas le droit d'être à peine en dessous du rythme. C'est tout le temps à bloc, dans le pilotage, dans les relances.

En Mass Start  tu es tellement cuit des relances que tu peux te permettre de te reposer dans le technique et dans le descendant. La plupart du temps, les types qui sont derrière toi, ils ne peuvent pas te doubler non plus.

Il vaut mieux mettre tout ce que tu as dans les relances pour doubler et après te reposer plutôt que l'inverse. C'est là où ça m'a joué un peu des tours. En juin à la Mountain Of Hell, je relançais à bloc sauf qu’après j’étais cramé dans la descente, je roulais mal. Sauf qu’en réalité tout le monde est un peu cramé et derrière, ils ne peuvent pas te doubler.

La semaine suivante, je me suis aligné sur la Coupe du Monde en Italie dans les Dolomites… et là je me suis fait ouvrir en descente sur les spéciales. Je n'étais pas du tout dans le bon rythme. C'est vraiment différent.
 

Ce n'est vraiment pas du tout le même effort. 

Crédit photo : ©Téo Level

 

Qu'est-ce que tu préfères rouler aujourd'hui ?

Je pense que je suis content de faire les deux, ils sont complémentaires. Je ne sais pas s'il y en a un que je préfère. Pour l'instant, je ne suis pas prêt à arrêter l'un et faire que l’autre.

Pour toi, que représente la Mégavalanche, plus globalement, pour un coureur d'enduro ?

C'est un peu la vitrine au grand public de l'enduro. Quand j'étais petit, je faisais du cross-country. Je n’y connaissais rien et pourtant, j'avais déjà vu des images de la Mégavalanche ou de la Mountain Of Hell.

Surtout, tu peux être le meilleur mondial ou le mec qui fait de l'enduro chez lui pour le kiff. Tu vas partir du même endroit le même jour et faire la même course. C'est ce mélange qui est beau.

Certains en vivent, pour d'autres c'est leur passe-temps et tout le monde prendre le même plaisir. À ma première participation, j'ai terminé 25ème et c'était une victoire pour moi ! 
 

Crédit photo : ©Valentin Morillhat

Cette année tu termines 4e… Tu réalises ?

Cette année, je n'attendais pas autant. Du coup, je suis trop content. Dans les années à venir, ça peut devenir un objectif de faire mieux.

Tu doubles Kilian Bron. Il a toujours fait de bons résultats à la Mégavalanche, c’est un spécialiste. Tu réalises ce que ça représente ?

C'est difficile de réaliser ce genre de chose. C'est beaucoup d'investissement pour en arriver et surtout les choses se sont faites progressivement. Mais c'est clair que c'est une fierté de pouvoir rouler avec des grands noms comme Kilian Bron, Alex Rudeau. J'essaye de séparer mon côté fan de mon côté pote. 

Tu es là où tu dois être.

Si j'en suis là, c'est que c'est ma place. Je ne vois pas de l'extérieur ce que pensent les gens, de la performance. De l'intérieur, j'ai fait ma course, j’étais dans mon élément. Et ça c'est trop bien.

Si j'en suis là, c'est que c'est ma place.

Tu es un touche-à-tout. Vidéaste, étudiant, athlète enduro. Comment est-ce qu'on concilie toutes ces casquettes à la fois ? En plus de ça, avec un tas de projets chaque année, est-ce que tu fais des concessions ?

C’est le plus dur en ce moment. Avant, le vélo prenait beaucoup moins de temps qu’aujourd'hui. J'arrivais à faire ça à côté des cours, sans souci. Maintenant, c'est de plus en plus compliqué mais j’ai le statut de sportif de haut niveau dans mon école.

Ça me permet de justifier mes absences quand je vais sur des courses. Je vais assez peu en cours toute l'année. Ça me libère beaucoup de temps pour le vélo, pour les projets vidéo, pour tous ces trucs-là. Par contre, quand c'est les périodes de partiels, je bloque tout. Pas de soirée, rien d’autre. Je passe de 6 entraînements par semaine à 1 ou 2 entraînements par semaine et beaucoup plus court.

Tu penses qu'un jour, il faudra faire un choix ou pas ?

Pour le moment, il n'y a pas de choix à faire. Il faut continuer tout. Les études se finissent dans 2 ans. Je suis en 4ème année et à son issue je pars en Pologne 6 mois. Tout va arriver assez vite. Je vais essayer de me faire kiffer en vélo si ça marche, et de travailler dans l'ingénierie ou dans la vidéo. 

Quels sont tes prochains projets pour le futur ?

Je ne sais pas ! Je n'ai pas encore l’idée. La chance que j'ai, c’est de travailler avec des marques qui me font confiance, où il y a un très bon aspect humain. Je n'ai pas besoin de leur promettre un gros projet pour re-signer et pour re-négocier le contrat. Je préfère leur montrer ce que j’ai fait, ce que je fais, et leur dire : “Si vous me donnez plus, je continuerai à me bouger encore plus.”

J'essaie de développer plusieurs aspects et de faire des vidéos un peu plus simples pour toucher d'autres gens. Mais sinon, je n'ai pas de gros projet encore.

Pour le moment, il n'y a pas de choix à faire. Il faut continuer tout.

Crédit photo : ©Téo Level

 


« Roulez jeunesse » c'est un peu ton mojo. Quelle est l’histoire derrière ça ? S'il y en a une.

Ça s'est fait un peu naturellement. J'ai dû entendre ma grand-mère ou alors, c'est une expression de vieux. Un jour, je l'ai un peu dit et les gens ont commencé à me le redire en retour et à m'associer un peu à ça.

Je me suis dit « Là, je tiens à un truc. Là, il ne faut pas que je le lâche ! ». C’est devenu mon petit slogan maintenant, et ça me ressemble.

Maël Feron avance avec lucidité, passion et un plaisir communicatif. Pas de plan de carrière rigide, pas de discours calculé, juste l’envie d’aller rouler, de raconter des histoires et de repousser un peu plus loin ses propres limites.
Dernièrement, il remporte la troisième place aux championnats de France d’Enduro en Corse. Un résultat qu’il n’avait pas vu venir, mais qui dit tout de lui. Entre études, vidéos et compétitions, il trace sa route à son rythme. Et si le flow est son moteur, on peut parier qu’il n’a pas fini de surprendre.

Texte de Louis Giannotta & Candice Tupin

 

Crédit photo : ©Téo Level / ©Alwena Feron

Roulez jeunesse !

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