Publié le 16 mai 2024
Trekking au coeur du Nord Pakistan
Crédit photo : © DR
Carnet de voyage

Trekking au coeur du Nord Pakistan

Deosai inconnu, de pics et de « Las »
ESCALADE ALPINISME, AVENTURE
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Carnet de Voyage

Au cours des quarante-cinq dernières années, Pierre Constant a sillonné les vallées et chaînes de montagnes les plus reculées de la planète. Il pensait ne jamais revenir et pourtant le cœur a ses raisons que la raison ignore. Les paysages sauvages du Pakistan lui sont apparus et n’ont jamais pu s’effacer de sa mémoire. Récit d’une aventure de 9 jours dans les confins de l’Himalaya pakistanais. 

DESTINATION : L’AVENTURE

Après des heures de voyages, les bagages prêtent à accueillir de nouveaux souvenirs, l’arrivée en terre sauvage est marquée par les retrouvailles entre un aventurier et son guide. Des liens forts issus d’expéditions passées remontent à la surface : “C’est mon troisième trek avec Zakir, après « Snow Lake » et la traversée des glaciers Biafo et Hispar (2013), puis « Spantik & Haramosh La » (2019). Depuis, mon guide est devenu un héros national après son ascension de Masherbrum, Broad Peak et plus récemment K2, le deuxième plus haut sommet au monde (8611m).” 

Crédit photo : "Notre Toyota traverse une rivière après le village de Shilla" © DR

À l'issue d’un petit déjeuner composé de ‘naan’ et de ‘chaï’, l’heure est à la planification du trek. Tout l’équipe est là : “Le cuisinier - également un Zakir - à la physionomie sérieuse d’un mongol barbu. Les quatre porteurs du village de Sadpara sont Gulam Hussein (43), Rasul (47), Kasim (45) et Akil, le plus jeune, souriant et dynamique, n’a que 17 ans.” Une fois la Toyota chargée des containers bleus et de tout le matériel de camping, le départ est alors fixé au lendemain. 

L’OMBRE DES GÉANTS

En direction de l’est, la route d’approche est de 3 heures “en longeant les eaux grises et minéralisées du fleuve Indus, entre d’impressionnantes gorges rocheuses.” La fin de la piste annonce le lieu du premier camp, établi à Ribou Brok, altitude 3900 mètres. L'acclimatation devient obligatoire quand on sait que l’altitude moyenne du plateau de Deosaï est de 4000 m, deuxième plus haut plateau au monde après le plateau Tibétain de Changtang. ‘Deosaï’ signifiant d’ailleurs ‘Ombre des géants’.

Avec une surface de 843Km2, le Parc National de Deosaï fût créé en 1993, pour protéger l’ours brun de l’Himalaya, menacé d’extinction. Partie intégrante de la région du Cachemire central, la chaîne s’étire sur 190 km. Reposant entre des montagnes aux pentes raides causées par l’érosion, le bassin de Deosaï apparaît comme un univers rude, dénué de population humaine.

Crédit photo : © DR

 

LES SENTIERS DE LA VALLÉE DE SHILLA 

Départ matinal, la vallée de Shilla accueille les premiers rayons du soleil, l’équipe entame une marche, direction un col culminant à 4600 mètres. Deux heures s’écoulent, avant une montée raide qui offre un panorama à 360° avec des pics enneigés, K2 (8611m), Masherbrum (7821m), et Broad Peak (8051m) pour ne citer qu’eux, qui transpercent l’horizon. 

En descendant vers le sud, un magnifique lac vert émeraude se fond parfaitement dans un écrin désertique, c’est alors le signe d’une pause bien méritée : “Zakir et les porteurs m’attendent en aval, pour un pique-nique de soupe de nouilles et de thé vert. La balade décontractée de l’après-midi mène au camp 2.” 

Crédit photo : © DR

“SHATUNG PEAK” 

4 heures, la flamme du réchaud émane une faible chaleur au sein de la tente et “un petit déjeuner d’œufs au plat ‘Pakistani style’, de chapatis avec beurre et confiture, accompagnés d’un café noir pour revenir à la vie” s’impose avant un départ imminent. Pierre et Zakir lancés dans leur ascension du Shatung Peak (5275m) : “un univers résolument minéral nous attend, éclairé par un lac bleu turquoise sur la droite. Je suis debout, bouche bée, au pied d’une falaise vertigineuse, avec une pente d’éboulis et de gros blocs rocheux. Intimidante au possible ! La progression finale, dans un goulet étroit, s’apparente à de l’escalade. Puis c’est le sommet de la falaise. Je suis déjà poussé au bout de mes limites, lorsque Zakir annonce avec un sourire : « Encore 1h30 à 2 heures… ». Prêt à abandonner et au vu de ma mine déconfite, il se reprend aussitôt: « OK, seulement 200 mètres… ». Soufflant comme un phoque, j’entame l’ascension ultime avec résilience. Une arête neigeuse précède le sommet de Shatung Peak, après 5h30 d’efforts soutenus. Aucune fierté, sinon la gratitude de l’objectif atteint. Avec humilité, je me suis surpassé. Shatung Peak s’élève à 5275m (5450m pour d’autres), mais la vision à 360° évoque celle du toit du monde !”

Crédit photo : Nanga Parbat dans la lumière du soleil matinal © DR
Crédit photo : Pier C peak (4800m), avant l’ascension © DR

LE PIC SANS NOM

« Que dirais-tu de faire l’ascension d’un sommet inconnu ? », lance Zakir enthousiaste, en visualisant une arête vers le sud. « On pourrait y donner ton nom et ce serait sur la carte… je n’ai jamais été là-haut, c’est tentant. »

Comme à l’habitude, départ à l’aube : “Il fait jour à 5h30, lorsque nous traversons la rivière. Nous gravissons la crête vers le soleil levant, pour nous élever au-dessus de la falaise.” Il est 7h30, une altitude approximative de 4800m, les deux compères approchent le sommet, qui sera officiellement nommé le “Pier C peak”. Retour au camp de base, à Shilla Brok. 

“ALI MALIK 2”

L’escale suivante oblige notre équipe à reprendre une route 4x4 afin de rejoindre la piste principale de Skardu à Astore, 152 km soit 5 heures pour la traversée du plateau de Deosaï. L’après-midi venue, un des porteurs Rasul et Pierre se lance à l’assaut d’un autre pic : « Tu as fait l’ascension d’Ali Malik 2 » (4362 m) me confirme Zakir. 

LA DER DES DERS

Le jour suivant, le soleil au zénith, le Burji Lake (4400m) aux eaux vert turquoise, en vue, une pente très raide se dresse face aux alpinistes, un col à 4815m d’altitude : “mon ultime défi sur ce trek.”

Crédit photo : © DR
Crédit photo : Les porteurs descendent du Burji La © DR

“En conclusion, notre trek est une boucle dans le sens des aiguilles d’une montre, côté est du bassin de Deosaï dans l’Himalaya occidental. Contraste frappant avec le Karakorum qui est essentiellement glacier et neige, l’Himalaya pakistanais est pelé et rocailleux. Dans ce ‘No man’s land’, adapté à un environnement hostile, comme si choisie par le désir des dieux, une vie animale unique et cachée survit, envers et contre tout.”

Texte de Eloïse Picard selon le récit de Pierre Constant

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