Publié le 15 juin 2019
Les Soul Flyers

Les Soul Flyers

L’art de s’envoyer en l’air
EXTRÊME
|
Wingsuit, Interview

Difficile de passer à côté de ce duo des airs, Fred Fugen et Vince Reffet, alias les Soul Flyers, affolent la toile depuis quelques années avec leurs expérimentations aériennes. Freefly, Base jump, Wingsuit, Jetman, chacune des disciplines exécutées à la perfection par le binôme est devenue un moyen d’expression et de créativité pour ces haut-savoyards loin d’en avoir fini avec les projets décadents pour ne pas dire illuminés. Entretien avec ces artistes de haut-vol

Comment l’aventure a-t-elle débuté ?

F : Nous ne sommes pas à l’origine des Soul Flyers, c’est une équipe qui a été créée en 2003 par Loïc Jean-Albert, Valéry Montant, Claude Remide et Stéphane Zunino qui sont 4 parachutistes, parapentistes et base jumpers. Ils se sont  unis pour partager leurs passions et réaliser des images. Nous les connaissions bien, ils nous ont fait rêver à une époque. Puis pour différentes raisons, l’équipe originale s’est arrêtée. Avec Vince, après les compétitions, lorsqu’on s’est lancés dans la réalisation d’images et de projets, on a naturellement décidé de relancer les Soul Flyers ensemble. 

On a vraiment voulu rester dans l’esprit de ce qu’ils faisaient, mixer les disciplines, réaliser de belles choses dans de beaux endroits, sans esprit de compétition, juste pour la beauté du sport et du spot.
Ça a démarré comme ça en 2010, même si on se connaissait déjà avec Vince. On faisait équipe ensemble depuis 2003 sur les compétitions. Donc quand on a décidé de relancer la team, on a continué de faire ce qu’on faisait à deux, tout en progressant, en cherchant des endroits pour de nouvelles expériences à réaliser. Du coup, on a peu à peu réussi à diversifier les disciplines et les projets.

Au final, avoir peur est une bonne chose. Le jour où tu n’as plus peur, ta vie est en danger. 

Effectivement vous pratiquez tout un lot de disciplines, base jump, wingsuit, freefly... Comment réussissez-vous à les mixer?

F : C’est l’idée de pouvoir mélanger les pratiques qui est intéressante. Le fait de toucher à tout te donne des idées pour d’autres expériences et ça te rend meilleur aussi. On pilote mieux car lorsqu’on progresse dans une des disciplines que l’on pratique, ça nous aide forcément à progresser conjointement dans une autre.

Et la vie personnelle dans tout ça ?

F : Le rythme est intense. On est loin de la routine mais on a la chance de vivre de notre passion, de pouvoir réaliser des rêves, on a des partenaires qui nous soutiennent. On fait en sorte que ça marche et on s’éclate !

V : Nos femmes sont nos premières fans, elles nous soutiennent à 100% dans les projets.

Les sports que vous pratiquez sont « à risques », comment gérez-vous cela ?

F : On n’a pas envie de mettre nos vies en jeu. On ne fait pas du 50/50, ce n’est pas non plus la roulette russe. On se prépare. Grâce à nos nombreuses années de compétition en parachutisme nous avons appris des méthodes de préparation et d’entraînements élaborées et utiles. Et même si le risque en compétition est moins élevé, on a fini par appliquer ces méthodes au base jump et au wingsuit par exemple.

V : On se sert aussi beaucoup de la visualisation dans la préparation.

F : Quand on sent qu’on est prêt, il y a toujours un petit stress, une appréhension, ce qui est normal. Mais dans notre tête on est sereins parce qu’on sait qu’on est préparés. Après, tu n’es jamais à l’abri d’un accident ou d’une erreur mais au même titre que lorsque tu prends ta voiture, et cela ne nous empêche pas de conduire tous les jours...

V : Au final, avoir peur est une bonne chose. Le jour où tu n’as plus peur, ta vie est en danger car tu ne te rends pas compte des risques que tu vas prendre.

F : Ce qu’on fait ça impressionne et la première idée qu’ont les gens c’est « ils sont fous! ». Mais on est quand même suffisamment réfléchis pour rester en vie! On sait prendre la mesure du danger et bien se préparer. Ça fait 23 ans que je saute, Vince quasiment 20 ans, et on a appris à progresser et à évaluer les risques. On a vu des accidents autour de nous donc on a su apprendre des autres, de leurs erreurs et des nôtres aussi.

On est loin de la routine mais on a la chance de vivre de notre passion.

De l’idée à la concrétisation, comment naissent les projets ?

F : Personne n’est vraiment mieux placé que nous pour savoir ce qu’on peut faire et ce qu’on a envie de faire. On pense à des projets puis on vient partager nos idées à la team chez Red Bull, notre sponsor. C’est ça qui est sympa aussi. Notre athlète manager est bien intégré dans le sport donc il sait de quoi on parle. Et puis après on peut s’appuyer sur d’autres personnes du marketing ou de la communication pour nous donner leur point de vue et amener un regard extérieur sur un domaine qu’ils ne connaissent pas. Des fois, il peut arriver que l’on parte dans des initiatives trop techniques, c’est bien d’avoir leur opinion pour que cela soit le plus accessible possible. Car au final, notre travail est aussi destiné au grand public et on essaie vraiment de toucher un maximum de monde avec ce qu’on fait.

Et vous vous entendez vraiment si bien que ça ?

V : On est un vieux couple !

F : Non on ne peut pas se saquer en fait mais bon après c’est le taf !

Vous pouvez nous en dire plus sur « Jetman » ?

V : C’est une machine qui a été inventée par un suisse, Yves Rossi. Pour nous, c’est l’évolution parfaite de notre sport. En tant que parachutiste ou base jumper, tu essayes de voler le plus longtemps possible lors d’un saut sauf que tu es forcément toujours rattrapé par la gravité. Avec Jetman, tu peux te permettre de planer et surtout rajouter un vecteur qui est de remonter en volant. On peut réaliser des chorégraphies qui n’étaient possibles jusqu’à présent qu’en chute, en descendant. C’est vraiment une extension de notre corps qui nous permet de voler comme un oiseau ou un avion !

Et c’est physique?

V : Non pas trop. En wingsuit par exemple, on doit tenir un profil lors du vol. Au contraire, là quand tu bouges c’est un peu comme quand tu étais gamin et que tu t’entrainais à faire l’avion. Tu baisses la tête tu descends, tu tires la tête vers le haut tu montes, tu twistes les épaules à droite ou à gauche tu tournes. On a un accélérateur dans la main droite, il active des mini-réacteurs qui créent une poussée de 200 kg pour toute l’aile. Quand on sort de l’hélicoptère, on a un poids de 170 kg, donc le rapport poids/puissance est complètement dingue! C’est une sensation dure à décrire.

F : Ce qui est génial, c’est qu’on utilise les mêmes techniques qu’en parachutisme. On bouge notre corps dans l’air, sauf qu’ici ce n’est pas la gravité qui te tire vers le bas, ce sont les moteurs qui te poussent à l’horizontale. On a des possibilités de précision semblables à un avion. Tout est contrôlé avec les mouvements du corps.

V : Tu ne donnes pas le contrôle à une machine, tu es la machine.

On s’intéresse à de nouvelles performances,  nouveaux matériels et endroits.

Vous faîtes aujourd’hui des conférences dans lesquelles vous partagez votre expérience. Est-ce une nouvelle perspective dans votre carrière ?

F : Effectivement, on a eu beaucoup de demandes pour faire des conférences, notamment suite à notre projet où on rentrait en wingsuit dans un avion en plein vol. On a donc essayé de faire ça bien en suivant des cours pour s’adresser à un public, et de se préparer au maximum. On y parle de gestion du stress, de réalisation des rêves, du travail en équipe... Certains de nos projets sont uniques et ajoutent un côté inédit à ce que les gens ont déjà pu voir. C’est intéressant de trouver des parallèles entre notre activité et le monde de l’entreprise.

V : Quand tu t’adresses à une audience, les personnes sont face à toi, tu peux expliquer ce que tu veux et être clair, alors que dans les médias, on passe souvent pour des fous. Ils exposent ce qu’ils veulent de nous, le côté spectaculaire, et orientent les questions. Lors des conférences, on est des athlètes, face à un public venu nous écouter et cela nous permet de retranscrire ce qu’on fait vraiment et l’expliquer avec nos mots pour que l’audience puisse trouver le parallèle et l’appliquer en entreprise. On peut expliquer aussi clairement que les risques qu’on prend sont calculés et qu’il est tout à fait possible de transposer ce fonctionnement au monde l’entreprise.

F : On utilise l’expérience qu’on a acquise toutes ces années, on se base sur des choses qu’on a vécues, cela rend les présentations d’autant plus parlantes aux personnes venues nous écouter. Il n’y a pas de filtres.

V : Il y a un truc qui se passe avec le public pendant une conférence, qui est vraiment trippant et réel. Juste avant de rentrer pour faire une conférence, on se prépare comme avant une compétition, avec la visualisation par exemple. Avant d’entrer sur scène, finalement, tu as le même stress qu’en compet’, le cœur qui bat, les mains moites, c’est assez marrant de retrouver les mêmes sensations grisantes que dans nos sports.

Le 25 février, vous avez réalisé un vol impressionnant en wingsuit au-dessus des pistes et des skieurs dans la station de la Clusaz. Vous nous racontez ?

V : Ça faisait longtemps qu’on avait envie de faire cette tentative dans notre station de cœur. On s’est toujours dit que ce serait un grand plaisir de pouvoir descendre les pentes sur lesquelles on glisse en ski mais en utilisant un de nos sports de prédilection, la wingsuit.

F : C’était génial de faire ça en partenariat avec la Clusaz qui nous a soutenu dans le projet. On s’est vraiment fait plaisir en vol !

La wingsuit se démocratise, quel est votre vision de ce sport extrême?

F : Les gens ont tendance à confondre base jump et wingsuit. À l’heure actuelle, la wingsuit n’est qu’un vêtement qui se gonfle et permet de planer. La pratique s’apprend largement dans les écoles de parachutisme. On saute d’un avion et on apprend à piloter sa wingsuit. Là il y a des brevets, des instructeurs, de grandes marges de progression. Maintenant, sauter de falaises avec une wingsuit, c’est une autre étape. Il faut déjà apprendre à faire du base jump. Ceci couplé à l’expérience acquise à piloter la wingsuit à partir d’un avion permettra de se servir des 2 pour voler à partir d’une falaise.

C’est une activité qui n’est pas vraiment réglementée aujourd’hui. Il n’y avait pas d’école jusqu’à présent, bien qu’il commence à s’en créer. Après c’est comme dans chaque sport de montagne, chacun doit prendre ses responsabilités et respecter des règles de sécurité.

V : C’est grisant de faire de la wingsuit. Elles sont de plus en plus simples à voler. Mais comme ce n’est pas encadré, certains apprennent juste le minimum pour pouvoir tenter un saut et c’est là qu’arrivent les problèmes. Ça fait partie des sports les plus engagés et paradoxalement, partie des sports les plus simples à mettre en œuvre. Pour donner une comparaison, tu n’auras jamais un débutant qui s’attaquera au surf de grosses vagues dès le départ. Il faut arriver à une certaine progression avant de s’attaquer à une telle vague. Alors que potientiellement n’importe qui peut se mettre à la wingsuit de son côté après avoir appris le base jump.

En wingsuit, il faut impérativement respecter le briefing (trajectoire) que tu t’es donné avant de sauter. Il ne faut pas changer en cours de vol, c’est là que les accidents surviennent. Il ne faut pas brûler les étapes.

A-t-on le droit d’en savoir plus sur les projets à venir?

V : On est en train de travailler sur un projet, c’est pour ça qu’on était à Dubaï ces derniers temps. Ce serait pour les alentours d’octobre ou novembre et si ça se fait, ça va être fat !

F : On ne peut pas en parler Vince !

Le plus gros jamais fait ?

V : On est dans une bonne lignée.

F : Ce sera différent. On aime faire des choses différentes. On s’intéresse à de nouvelles performances, nouveaux matériels et endroits. Cela permet de ne pas se lasser. On nous demande souvent quel a été le projet le plus fou… En fait, chaque projet amène beaucoup de plaisir que ce soit dans la préparation ou dans la réalisation. Et ce qui est cool c’est de faire sans cesse des choses inédites.

V : Donc là si tout se passe bien, il y a un gros projet voire plusieurs qui arrivent…

 

 

Interview : Olivia Bergamaschi

C’est vraiment une extension de notre corps qui nous permet de voler comme un oiseau ou un avion !

Vous voulez des cookies ?

Ce site utilise des cookies pour garantir la meilleure expérience de navigation.

En poursuivant votre navigation, vous acceptez le dépôt de cookies tiers destinés à vous proposer des vidéos, des boutons de partage, des remontées de contenus de plateformes sociales

Paramétrage de mes cookies

Au-delà des cookies de fonctionnement qui permettent de garantir les fonctionnalités importantes du site, vous pouvez activer ou désactiver la catégorie de cookies suivante. Ces réglages ne seront valables que sur le navigateur que vous utilisez actuellement.
1. Statistiques
Ces cookies permettent d'établir des statistiques de fréquentation de notre site. Les désactiver nous empêche de suivre et d'améliorer la qualité de nos services.
2. Personnalisation
Ces cookies permettent d'analyser votre navigation sur le site pour personnaliser nos offres et services sur notre site ou via des messages que nous vous envoyons.