LA COURSE DE L'ESCALADE

Les marathons de New-York, Boston, Berlin ou Londres, le Grand Raid de la Réunion, l’Ultra-Trail du Mont-Blanc, Marseille-Cassis, sont autant de courses mythiques dont il convient d’épingler un jour le dossard. Des bitumes ou des sentiers qu’il faut fouler avant la fin de sa carrière sportive pour pouvoir faire son entrée au panthéon des coureurs aguerris. Une autre épreuve, tout aussi célèbre et populaire, doit à cet égard se glisser dans votre palmarès : la Course de l’Escalade.

Le 1er décembre prochain, à Genève, ce n’est pas le baudrier qu’il faudra enfiler mais bien des baskets qu’il faudra chausser pour inscrire votre nom au mur des athlètes accomplis. Julien Wanders, vainqueur en titre, coureur qui représente à la fois le présent et le futur de l’athlétisme suisse, nous montre la voie et nous offre, sous forme de prises, des arguments irréfutables quant à une participation à la prochaine édition de l’Escalade. Sortez vos baskets, et rangez vos mousquetons.

UN DOSSARD COMME LIVRE D’HISTOIRE

Courir l’Escalade, c’est un peu comme assister à un cours, ludique et synthétique, de l’Histoire de la Suisse. Organisée depuis 40 ans, le premier week-end de décembre, l’épreuve précède d’une semaine la commémoration de la victoire de la République protestante de Genève sur les troupes du Duc de Savoie Charles-Emmanuel 1er. Dans la nuit du 11 décembre 1602, les envahisseurs savoyards auraient en effet tenté d’escalader les barricades de la ville au moyen d’échelles en bois démontables. D’où le nom de la course qui, si elle reste une belle joute athlétique, a perdu tout symbolique guerrière pour devenir un monde de quiétude et de partage. 

UN DOSSARD COMME TRADITION

Plus que l’Histoire, c’est la tradition qui ramène chaque année Julien Wanders battre le pavé genevois : « C’est la première compétition que j’ai faite. Le souvenir est encore très présent. J’avais 6 ans, j’étais en poussin B et j’ai du terminé 150ème de ma catégorie. Ensuite, je n’ai pas raté une seule édition jusqu’à mes 16 ans... Et désormais, c’est l’une des premières dates que je coche dans mon calendrier ! » La relation qu’entretient avec la Course de l’Escalade l’athlète franco-suisse, détenteur du record du 10 km sur route des deux côtés de la frontière en 28 min et 2 secondes, témoigne de la place de choix qu’elle occupe dans le coeur du public, quelque soit son âge ou son niveau. Amateurs plus ou moins affûtés ou élites professionnels, l’Escalade a mis la basket à l’étrier de nombreux coureurs et a maintes fois constitué un terreau propice à l’enracinement d’une passion pour l’athlétisme. Julien renchérit : « C’est extrêmement important pour moi de la courir. Quand je la manque, je suis déçu. La gagner fût une consécration, car c’est en admirant courir les élites lors de mes premières participations que mon rêve de devenir un champion est né. »

UN DOSSARD COMME CIRCUIT TOURISTIQUE

L’une des singularités qui a fait le succès de l’Escalade, c’est son parcours : 3 tours dans les rues de la vieille ville de Genève pour un total de 7,323 km. L’occasion de passer 3 fois devant certains monuments qui font la richesse culturelle de la métropole et fondent son attractivité touristique. Le départ se fait depuis la rue de la Croix-Rouge, se dirige vers les Tranchées puis le Bourg-de-Four avant de remonter la rue de l’Hôtel de Ville pour tourner derrière la cathédrale Saint-Pierre, direction la place Neuve et le parc des Bastions. Un tracé urbain mais agréable que Julien a souvent utilisé comme circuit préférentiel pour effectuer ses footings : « C’est à seulement 2 ou 3 km de chez moi. Mon collège était situé juste à côté. Je connais donc très bien l’endroit. D’autant plus qu’avec ma famille, les dimanches précédents la course, nous allions reconnaitre le parcours en trottinant. C’était la tradition avec mes cousins. »

UN DOSSARD POUR FAIRE LA FÊTE

L’argument qui a fini de valider la candidature de l’Escalade au palmarès des courses que tout passionné de sport se doit de découvrir, c’est l’atmosphère magique qui y règne. C’est certainement la raison pour laquelle l’évènement ne se définit pas uniquement comme une compétition sportive, mais bien comme une « fête populaire ». Avec ses 51 147 inscrits en 2017, la corrida genevoise se veut la plus courue de Suisse. Et de loin. L’un des moments-clés du week-end est d’ailleurs la course dite de « La Marmite » voulue « déguisée, non compétitive par excellence, où l’esprit de famille, l’amitié et l’humour sont prioritaires ». Julien se montre lui dithyrambique quant à l’ambiance qui émane de l’épreuve : « Honnêtement, c’est un truc de malade ! Je n’ai jamais vu une course avec une telle ferveur. Lorsque tu viens pour la première fois, tu ne comprends pas ce qu’il t’arrive… »

UN DOSSARD RESTE UN DOSSARD

Oui, les dimensions festive, populaire, symbolique et historique ont fait la renommée de l’évènement. Mais celles-ci n’ont pas entravé le fait que, comme son nom l’indique, l’Escalade reste une course. Une course de très (très) haut niveau même, où viennent s’écharper quelques-uns des meilleurs athlètes internationaux. En effet, située début décembre, cette compétition constitue pour les coureurs élites une superbe préparation hivernale, dans un contexte très relevé. D’autant plus que « le parcours est exigeant et sélectif » affirme Julien. Il détaille : « C’est particulièrement vallonné, il y a beaucoup de relances, il faut donc être fort musculairement et surtout ne pas partir trop fort dans le premier tour. » Une ambiance et une émulation propices au plaisir et à la performance : à n’en plus douter, cet hiver toutes les voies mènent à l’Escalade.

Texte : Baptiste Chassagne
Photos : Martial Trezzini / DR / E. Bayart / Liviaux Bertrand