Vincent Tupin, 31 ans, est un athlète incontournable de la scène VTT Freeride. Véritable touche à tout, ce vététiste qui a commencé par le DirtJump avant de se tourner vers le Freeride, jusqu’à devenir champion du monde de VTT sur neige, possède plus d’une corde à son arc pour impressionner. Lui qui a participé à 4 reprises à la Redbull Rampage, passe cette année le flambeau à l’un de ses amis riders : Tomas Lemoine, pour qui il est « shaper » sur l’event (constructeur de piste).

Zoom sur la Redbull Rampage
Le Red Bull Rampage est la plus prestigieuse compétition de VTT Freeride à l’échelle mondiale. Organisé chaque année près du parc national de Zion, cet événement met en compétition 18 riders, qui en l’espace de 8 jours, doivent créer à la main, la ligne Freeride la plus créative et engagée. Pour ce faire, ils sont aidés de 2 shapers chacun, qu’ils choisissent en amont de la compétition.

À l'issue de cette longue semaine, les 18 riders devront ensuite descendre avec “style”, sur deux runs distincts, la ligne unique qu’ils ont creusé. Les critères de notation se basent sur le choix des lignes, l’amplitude des sauts, la propreté des réceptions, le niveau de difficulté des figures, la technicité du tracé, ainsi que la vitesse à laquelle ils descendent. La Rampage a, au fil des ans, permis l’émergence du Freeride et fait croître en crédibilité cette discipline, souvent reléguée au second plan dans le cyclisme.

Vinny T : Une passion inébranlable
Vincent est un acharné, un passionné de vélo dans sa globalité. C’est pourquoi la moitié de l’année, vous pouvez l’apercevoir une pelle à la main, prenant autant de plaisir à construire une piste qu’à la descendre avec style l’été venue. Lui qui a fini 10ème à la Rampage 2019, est aujourd'hui shaper à ce même event pour un de ses amis : Tomas Lemoine.

Mais qu’on ne s’y méprenne pas, se retrouver sur cette terre de légende, une pioche ou un guidon à la main, ne signifie pas perdre ou gagner en prestige. Ce qui importe, ce n’est pas la manière dont prend forme notre passion mais la finalité de celle-ci : partager entre amis une aventure inoubliable au milieu du désert américain.
C’est pourquoi en ce mois d’octobre, Vincent est de nouveau au pied des mythiques canyons de l’Utah. Le Haut Savoyard est cette année accompagné de Seb Giraldi, un pionnier des bikeparks (stations de VTT) de Haute-Savoie. Il a notamment été, ces dernières décennies, à l’initiative de la construction des pistes de Châtel (Portes du Soleil), Bernex et Val Thorens. Il est également le fondateur de la société de shape BikeVision Design.

Seb est connu comme le loup blanc dans le cercle des Freeriders français et ce n’est pas la première fois qu’il se rend en Utah pour creuser. En 2022, il avait accompagné William Robert, un autre freerider français, dans la construction de sa ligne.
Ainsi, Vincent n’est certes pas là pour dévaler ces faces abruptes mais en troquant son fidèle Scott contre un bender et des sceaux, il s’offre une belle aventure humaine entre copains.

Tomas Lemoine : un ovni parmi les clones
Tomas Lemoine, qu’on pourrait qualifier “d’ovni du VTT”, à lui commencé par le BMX Race avant de se tourner vers le DirtJump puis le Slopestyle. Il est l’exemple même d’un athlète évoluant dans un sport en pleine transformation. En 2022, il se retire de la scène mondiale du Slopestyle : le Crankworx World Tour, à l'issue d’une troisième place à la plus grande étape du tour : la Redbull Joyride.

2022 passé, c’est naturellement que Tomas s’oriente vers le VTT Freeride, une discipline old school et underground à la mode, malgré un manque de professionnalisme de par son esprit puriste. Mélange parfait entre le DirtJump (Freestyle) et le VTT de Descente (Race), le Freeride se pratique sur un cadre de vélo de descente au Set Up (réglages) de VTT Slopestyle : suspensions et pneumatiques gonflées à bloc, esthétique originale, jantes épaisses et solides, pédales plates…
C’est ainsi que le Marseillais, l’un des riders les plus polyvalents sur un deux roues, assume très vite son ambition de participer à la Rampage. Chose dite, chose faite, il est cette année l’unique Francais invité.
C’est de manière intuitive que Tomas choisit de faire confiance à Vincent et à Seb, forts de leurs expériences passées, pour la construction de sa ligne. Une construction longue et exigeante qui devra savoir mettre en valeur l’immense palette de ses tricks (figures) et son style inimitable.

Rencontre avec Vincent Tupin, shaper sur la Rampage 2025
Tu as déjà participé à 4 reprises à la Rampage en tant qu’athlète, qu’est ce qui change quand cette fois-ci on s’y rend pour creuser, qui plus est pour Tomas Lemoine, un ami ?
Ma première expérience à la rampage s’est faite en 2015 en creusant pour Nico Vink, ça me rappelle donc des souvenirs que de creuser à nouveau pour un ami. Shaper, c’est quelque chose que j’apprécie car on ne vit pas la pression comme en tant que rider. En plus de ça, on forme une très bonne équipe avec Seb.


Peux-tu nous expliquer le déroulement d’une journée type de shape à la Rampage ?
La journée commence très tôt, généralement vers les 6h pour être sur place à 7h30. Ensuite on monte à pied et on se met directement au travail. On prévoit déjà la veille ce sur quoi on va avancer. On a une petite pause à midi et dès le début d’aprem on repart creuser jusqu’à 19h30. C’est le même programme pendant 8 jours.
Qu’est ce qui est si particulier ici quand on creuse, comparé aux Alpes ?
La terre est vraiment unique ici, facile à creuser tant que tu tombes pas sur des cailloux durs. Les mouvements de terrains se prêtent aussi très bien à la création de la ligne. Et grâce à l’accès à l’eau, tu peux créer en très peu de temps une bonne ligne de Rampage.
Qu’est ce qui cette année change sur la compétition comparé aux précédentes éditions ?
Pas grand chose, la zone de cette année a déjà été utilisée en 2016, 2017 et 2021. C’est donc la 4ème fois qu’on creuse sur la même face, c’est dommage car il n’y a quasiment plus de place pour de la nouveauté avec les anciennes lignes encore présentes. Cette année la véritable amélioration vient de l’accès à l’eau pour construire les modules, ce qui nous fait gagner beaucoup de temps et d’énergie.
Quelles sont vos stratégies cette année à toi et ton équipe pour construire un tracé unique et original ? Tu dirais que la ligne que vous creusez est plus créative ou engagée ?
Tomas avait bien repérer la face à l’aide de vidéos. Il avait déjà une idée de quel côté il voulait descendre. Lors du jour de repérage on s’est bien creusé la tête avec l’équipe pour faire une ligne à nous de À à Z. Je dirais qu’on a réussi à 90% donc c’est cool ! Le tracé est un mix de créativité et d’engagement. Je pense que la plupart des personnes qui connaissent le style de Tomas ne s’attendent pas à le voir rouler ce genre de ligne.

C’est la première fois que Tomas participe à l’évènement, ancien slopestyler de renom, l’idée est elle aussi de créer une ligne qui lui permette d’exprimer son passé de slopestyler, notamment avec des tricks qu’il avait l’habitude de réaliser aux Crankworx ?
Je dirais que Tomas n'était pas arrêté sur une idée ou une autre, il veut vraiment vivre sa première Rampage sans regrets, sans faire comme tout le monde. Il est super polyvalent même si la plupart des gens le qualifient encore de slopestyler. Il y a des modules où il pourra exprimer ses tricks et des passages bien plus freerides avec des gros drops et de la pente.

Est ce que le fait d’être shaper à la Rampage pour la première fois, te donne à nouveau envie de participer en tant qu’athlète à l’évènement ?
C’est sûr que ça donne envie de rider à nouveau cet événement, mais ça me fait aussi me rendre compte que je n’aimerai pas courir à nouveau sur une face comme celle ci, qui est saturée de lignes faites dans le passé. Je suis super content d’avoir eu la chance de participer à cet event plusieurs fois, dont une sur une face vierge. Je ne sais pas si cela arrivera à nouveau.
Toi qui a fini 10ème à cette compétition en 2019 , quels conseils donnerais-tu à Tomas pour sa première participation?
Je le soutiendrais pour vivre cette expérience à fond comme il le fait déjà. C’est un compétiteur, tout l’inverse de moi, alors je ne me fais pas trop de soucis pour lui.
Pour cette 21ème édition de la Rampage, on ne peut que souhaiter à Vincent et à Seb de profiter de cette belle aventure et à Tomas de faire briller la France en Outre-Atlantique !

La finale de la RedBull Rampage est à retrouver en live sur Red Bull TV ce Vendredi 17 Octobre à 18h30 pour les femmes, et ce Dimanche 19 Octobre à 18h00 pour les hommes (heures françaises).
Texte de Candice Tupin